Vous ne le méritez pas mais je vais vous le raconter
quand même. Je serai une fois encore généreux et vous raconterai en quoi
consiste la vie. Je suis allé à Biarritz accompagné d’amis que je
connaissais mais avec lesquels je n’avais encore jamais vécu. J’ai rencontré
“El solitario” et sa myriade de vielles grosses motos, transformées en amas de
fer et de roues, de fourrure, de couvertures et de cordes. Ce type a passé sa
vie à New-York, en jouant sur down-street, mais ne la gagne qu’aujourd’hui dans
un village des rivières galiciennes. J’ai croisé quelqu’un que je connaissais
déjà, Alberto García-Alix, un itinérant, un homme qui est revenu d'entre les
morts à plusieurs reprises. A Tous les membres de wheeles & waves,
français, Tsiganes, Basques. Tous les soirs nous jouions au poker et moi, je
misais mes livres, et des livres écrits par d’autres auxquels j’ai collaboré.
Ils me donnaient des cartes et je perdais encore et encore, main après main. « A
quoi te servent tous ces livres ? » me demandèrent-ils. « A rien » leur
dis-je, « mais ce sont mes bouées de sauvetage quand je perds mais aussi
quand je gagne. » Ils ont ri comme rient les hommes qui savent de quoi
l’on parle, sans chercher d’histoire, de face, je le sais parce qu’ils ont
parcouru chaque jour de leur vie pour venir jusqu’ici, parfois en marchant,
d’autres fois sur des vieilles grosses motos, de celles qui vous font voler les
cheveux et serrer les mâchoires à vous broyer les gencives, la pluie, le vent,
sous l’orage et le soleil, sachant qu’il leur reste quelque chose de plus à
vivre devant, bien plus qu’à vous, qui vous dédiez à vous pincer les uns les
autres avec vos minuscules ongles laqués, qui vous réfugiez dans la vanité, la drogue
des chips et des pipas, sans bière, sans clope, sans femme qui ait donné le
jour par-dessus les vents, hydratées par la graisse de moteur. J’ai mangé des
hamburgers avec des voyous-ingénieurs en moteurs, des photographes-voyous, des écrivains
sans autre emploi, des pilotes ayant de grands enfants qui n’aiment pas le
surf. Nous avons parlé de choses futiles en plusieurs langues. Nous nous sommes
baignés dans les eaux froides de ces côtes que frappent les vagues mâles et
femelles. Je ne réponds pas à ces questions car je ne sais pas, je ne sais pas ce
que je fais ici, vivre et mourir aux côtés de post-quarantenaires, forts comme
des pontons de granite qui savent se renverser au sol et au soleil, qui ne
craignent rien car ils ont commencé par chercher ce qui leur faisait peur. Je
suis là pour que tous ceux-là me donnent cette force dont j’ai besoin pour mes
enfants. Je suis venu avec elle, mais ma femme ne pense qu’à mes enfants et moi
je ne pense qu’à atteindre, accomplir mes mots et ma voix. Parce que je sais
que ce jour viendra patiemment, ce que je ne sais pas c’est si je saurai reconnaître
quand tout commencera à s’effacer, à s’oublier, à ne plus savoir leurs noms et
qu’ils devront eux-mêmes se charger de décrire au tatoueur le contour du
dernier dessin, quand la peau ne se lavera plus. Elle est là avec l’expression
de ne rien comprendre, embrassée par le froid, si contaminée par les vieux faux
rires, ceux des croyances populaires qui ne donnent rien d’autre que des
promesses, je ne sais si elle tiendra une minute de plus ou si elle restera
avec moi pour toujours. Les enfants et l’horreur d’être né à nouveau, de
continuer de naitre encore et d'explorer la part des ténèbres et de la mémoire
de tous.
Biarritz 2015. Wheels and
waves.
De la traducción, Thomas Jaguar
w&w F.Nikko
No os lo merecéis, pero os lo voy a contar. De nuevo seré generoso y os
contaré en qué consiste la vida. He estado en Biarritz con amigos a los que ya
conocía pero con los que nunca había vivido. He conocido a El solitario y su
camada de motos grandes y viejas, transformadas en amasijos de hierros y
ruedas, piel de pellejos, mantas y cuerdas. Este tipo afinó su vida en Nueva
York, mientras jugaba en Down Street, pero es ahora cuando empieza a ganar en
un poblado de las rias gallegas. He conocido a alguien que ya conocía, Alberto
García-Alix, un itinerante, un hombre que ha vuelto de la muerte varias veces.
A todos los miembros de wheeles & waves, franceses, gitanos, vascos. Al
final de cada jornada jugamos al poquer y yo ponía encima del tapete mis
libros, los libros de otros en los que yo colaboré. Me daban cartas y una y
otra vez perdía, mano tras mano. De qué te
sirven todos esos libros”, preguntaron. De nada dije, pero son mi tabla
de salvación cuando pierdo y también cuando gano. Se rieron como se rien los
hombres que saben de lo que les hablas, sin querer intrigar, de frente, lo sé
porque han recorrido todos los días de la vida hasta llegar allí, unas veces
andando y otras en motos viejas, grandes, de esas que te mueven el pelo y
aprietas la mandíbula hasta romperte los encías, la lluvia, el viento, bajo las
tormentas y el sol, sabiendo que les
queda algo más de vida por delante, bastante más que a vosotros, los que os
dedicáis a pellizcaros unos a otros con esas uñitas esmaltadas, los que os
refugiáis en la vanidad, la droga de las patatas fritas y las pipas saladas,
sin cerveza, sin cigarrillos, sin mujeres que hayan parido encima del viento, ,hidratadas
con la grasa del motor. He comido hamburguesas de buey junto a
hampones-ingenieros en motores, fotógrafos-hampones, escritores sin otro
trabajo, pilotos con hijos mayores a los que no les gusta surfear, hemos
hablado de cosas sin importancia en varios idiomas. Nos hemos bañado en el agua
fría de estas costas que golpean las olas macho y las hembras. No contesto a
esas preguntas porque no las sé, no sé que hago aquí, vivir y morir al lado de
tipos con más de cuarenta años, fuertes como moles de granito que saben
tumbarse en el suelo y al sol, que no tienen miedo porque primero intentan
saber qué les produce miedo. Estoy aquí para que todos ellos me den esa fuerza
que necesito para mis hijos. He venido con ella, pero mi mujer piensa todo el
tiempo en mis hijos y yo solo pienso en tener fuerza para llegar, cumplir con
mi palabra y mi voz. Porque sé que el día llegará poco a poco, lo que no sé es
si sabré reconocer cuando todo se empiece a borrar, a olvidar, cuando no sepa
sus nombres y sean ellos los encargados de decirle al tatuador la forma del
último dibujo, cuando la piel ya no se pueda lavar. Está ella aquí con cara de
no entender nada, abrazada al frío, tan contaminada de las viejas y falsas
risas, de esas creencias vulgares que nada dan, salvo promesas, que no sé si
aguantará un minuto más o se quedará conmigo para siempre. Lo hijos y el horror
de haber nacido otra vez, de seguir naciendo de nuevo y recorrer esa parte que
está en la penumbra y en la memoria de todos.
Biarritz 2015.
Wheels and waves.
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